Madame Monk et moi sommes au Québec depuis la fin de semaine dernière. Nous ne nous ennuyions pas vraiment de l'hiver québécois qui persiste en force cette année encore au-delà du
mois d'avril. Mais nous sommes les heureux parrain et marraine de Mireille, la petite fille de mon frère, et le baptême avait lieu en fin de semaine dernière. Nous ne l'aurions raté pour rien au monde! Surtout que nous n'avions pas encore eu la chance de rencontrer ce joli petit «bout-de-choux» né en janvier...
Quel repas de veillée pascale... Mais je ne vous parle pas de la sauce à spaghetti de Daniel, de la lasagne que France a faite avec cette sauce légendaire, du bon vin que nous avons dégusté, de la génoise aux noisettes, des truffes au chocolat et au rhum, de cette salsa multi-étagée (un classique de la cuisine Kraft, j'imagine, mais étonnamment savoureuse et addictive...). Je ne vous parlerai pas non plus du brunch de Pâques de ma belle-maman, une tablée infinie comme à l'habitude. Il y a des journées comme ça où nous ne mangeons qu'un repas par jour...
La période de Pâques est contemporaine de l'arrivée du printemps, par définition papale. Hors, au Québec, l'arrivée du printemps nous dégèle un peu, et il en est ainsi pour les feuillus dans la foulée. La province entière célèbre le temps des sucres, dont j'ai rêvé récemment en ces pages. Témoin d'une époque dénaturée, nombre de cabanes à sucre aujourd'hui sont essentiellement industrielles et ne représentent que très peu l'expérience d'une cabane traditionnelle. Heureusement, ma tante Lise et mon oncle Paul, cultivateurs, sont également des acériculteurs. Leur cabane, située dans une forêt d'érables au bout de leurs terres, est essentiellement traditionnelle. Même si les méthodes de production ont été actualisées et que la cueillette est maintenant automatisée, les lieux sont demeurés typiques d'une cabane que l'imaginaire collectif se représente ainsi : un plancher de terre battue, des murs en bois non isolés, une cuisine rustique, l'absence d'eau courante, une table communautaire au coeur du processus de production. On mange de la couenne en faisant chauffer la notre au bord de l'évaporateur chauffé au bois!
Le repas est toujours simple et typique d'un repas de bûcheron québécois! Mon oncle Denis amène des «beans» (fèves au lard) pour tout le monde, et il prépare aussi les oeufs. Mon oncle Paul (l'agent immobilier) fait des crêpes qu'il cuit sur le poêle à bois, et il ne se gêne pas sur le shortening pour cuire ses crêpes bien épaisses. Mon oncle Sylvain fait cuire le jambon juste à côté. Ma mère amène quant à elle son rôti de lard, qu'on partage fièrement. Ma tante Lise prépare ses grands-pères dans le sirop. Elle ajoute maintenant des poires, qu'elle cuit quelques minutes dans le sirop bouillant, avant d'ajouter la pâte. Les oeufs dans le sirop sont aussi de son cru. Elle prépare en plus les «oreilles de crisse». Il s'agit de couenne de porc salée, frite! Elle acquière pendant la cuisson la forme d'une oreille, d'où le nom. Pour la deuxième partie du nom, le politically incorrect crisse, on l'attribue parfois, selon le grand dictionnaire terminologique, aux travailleurs des chantiers forestiers du Québec d'antan. L'ajout d'un juron, crisse ou Christ, servait à relever l'expression. À défaut de relever la saveur! Quoiqu'une fois par an, on aime bien... Et avec une bière, c'est fantastique!
Mais tout ça pour un moment de la journée bien particulier, celui où mon oncle Paul (l'acériculteur), après un long moment, arrivera à table avec la tire, encore plus concentré que le sirop d'érable. Il la versera par petite quantité sur la neige. Après quelques secondes d'attente, cette tire sera suffisamment refroidie et solide pour la prélever à l'aide d'un petit bâton. Il ne reste alors qu'à déguster. Une fois dans la bouche, c'est l'extase, cette tire qui fond lentement... Un goût incomparable qu'on ne savoure qu'une fois par an.
À mon grand désarroi, il n'y avait pas cette année de pets de soeur... Soeur ou nonne, peu importe. Voici la recette pour les apprêter au sirop d'érable.
Pets de soeur à l'érable
Pâte
1 abaisse de pâte à tarte
70 g de cassonade
70 g de beurre
Sirop
1 tasse (250 mL) de sirop d'érable
½ tasse (125 mL) d'eau
¾ tasse cassonade
1 c thé de jus de citron
1 pincée de sel
Tout d'abord, démarrer la musique et «swinger» votre compagnie!
Préchauffer le four à 400°F.
Préparer la pâte :
Abaisser la pâte à tarte en un rectangle et la parsemer de cassonade et de noisettes de beurre. En commençant par l'extrémité la moins large du rectangle. Rouler assez serré, mais pas trop, pour former un rouleau que vous couperez transversalement en tranches de 1 cm d'épaisseur. Vous obtenez ainsi de magnifiques rondelles de pâtes concentriques, que vous disposerez à plat, dans un plat en verre allant au four. Si vous voulez une présentation moins rustique pour recevoir de la visite, vous pouvez utiliser de plus petites rondelles, mais plus épaisses, que vous disposerez dans des ramequins. Ajustez alors le temps de cuisson.
Préparer le sirop :
Dans un chaudron, amener les ingrédients à ébullition. Lorsque la cassonade est dissoute, verser sur la pâte pour couvrir. Enfourner 30 à 40 minutes, jusqu'à ce que la pâte soit cuite et le sirop épaissi et collant... Tout simplement merveilleux!
Source : c'est la recette de ma mère, qui la tient de sa mère, qui la tient de sa mère, ...
Technorati Tags :pets de soeurs, pets de nonnes, tarte à l'érable, sirop d'érable, cabane à sucre, tire d'érable
Generated By Technorati Tag Generator